Login

L’huissier n’avait pourtant qu’à recopier

Le bailleur peut demander la résiliation du bail s’il justifie de deux défauts de paiement de fermage. Encore faut-il que le formalisme soit respecté à la lettre.

Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.

L’histoire

La résiliation du bail rural est une sanction trop grave pour qu’elle intervienne sans le respect d’un formalisme exigeant. Serge ne pourra qu’acquiescer. Il avait donné à bail à Luc un corps de ferme, comprenant une maison d’habitation, des bâtiments d’exploitation et un parcellaire d’une centaine d’hectares, situé au cœur du pays de Caux. L’état des bâtiments étant très dégradé, Luc avait obtenu la désignation d’un expert chargé d’évaluer les travaux de réparation. Mécontent de cette initiative, Serge lui avait adressé un commandement de payer un arriéré de fermage puis, trois mois plus tard, avait saisi le tribunal paritaire en résiliation du bail.

Le contentieux

Le succès de la demande de Serge était-il assuré ? Pour le vérifier, la lecture de l’article L. 411-31 du code rural s’impose. Le bailleur peut demander la résiliation du bail s’il justifie de deux défauts de paiement de fermage. Ces derniers doivent avoir persisté à l’expiration d’un délai de trois mois après mise en demeure par le propriétaire. Celle-ci doit être postérieure à l’échéance du paiement du fermage et doit, à peine de nullité, rappeler les termes de ces dispositions. Or, pour Serge, la situation de Luc était indéfendable. Le commandement de payer qu’il lui avait délivré portait bien sur deux échéances de fermage, de mai 2010 à novembre 2012. À ces montants, s’ajoutaient le loyer de la maison d’habitation et les taxes d’ordures ménagères. De plus, la jurisprudence semblait lui donner raison, en admettant que les deux défauts de paiement peuvent faire l’objet d’une seule mise en demeure, dès lors qu’ils portent sur des échéances différentes. Mais Luc n’avait pas baissé les bras : il avait placé le débat non pas sur le terrain des raisons sérieuses et légitimes visées à l’article L. 411-31, qui auraient pu justifier le retard dans les paiements, mais sur celui du formalisme du commandement. En effet, l’huissier de justice n’avait pas reproduit de manière intégrale les dispositions de l’article L. 411-31 1° du code rural. Ainsi, l’acte était nul et la résiliation du bail ne pouvait être prononcée. Face à cet argumentaire, les juges n’avaient pas été convaincus par le fermier. Certes, le commandement ne reproduisait pas les dispositions du texte incriminé, mais il précisait que le bailleur pouvait demander la résiliation du bail. Une indication qui était en mesure de faire comprendre à Luc l’étendue de sa carence. Saisie par ce dernier, la Cour de cassation a censuré les juges du fond. Pour elle, le respect de la procédure de résiliation exige une citation strictement littérale de l’article L. 411-31 1° dans le corps de la mise en demeure adressée au fermier. Luc a eu raison de persister.

L’épilogue

Il pourra être rassuré sur un point : la résiliation de son bail ne pourra être prononcée par la cour de renvoi. Pour autant, il n’en devra pas moins régler, sans tarder, l’arriéré de loyer. À défaut, il ne pourra échapper à la résiliation de son bail, après une nouvelle mise en demeure régulière adressée par Serge.

A découvrir également

Voir la version complète
Gérer mon consentement